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Caring for kids new to Canada

Guide pour les professionnels de la santé œuvrant auprès des familles immigrantes et réfugiées

Les facteurs de risque prénatals de retard de développement chez l’enfant nouvellement arrivé au Canada

Faits saillants

  • Une seule personne peut présenter un ou plusieurs troubles du développement. Ces troubles peuvent prendre la forme de problèmes cognitifs ou sensoriels, de problèmes sociaux ou de difficultés de la communication ou du langage, d’une atteinte motrice, d’un retard adaptatif ou d’un mélange de ces divers problèmes.
  • De 10 % à 20 % de la population mondiale présentent un trouble du développement.
  • Les facteurs de risque prénatals incluent une maladie chronique de la mère, certaines infections de la mère, l’exposition aux toxines et les carences nutritionnelles.
  • Les facteurs de risque pendant la période périnatale incluent les complications liées à la grossesse, la prématurité et le faible poids à la naissance, ainsi que l’exposition aux infections pendant la grossesse ou au moment de la naissance.
  • L’absence d’accès à des soins de qualité pendant la grossesse ou l’accouchement et peu après la naissance peut nuire considérablement aux résultats cliniques chez la mère et l’enfant et contribuer à des troubles du développement.
  • Le manque de soins à la mère et à l’enfant constitue un problème important dans les pays en développement. De même, l’absence d’assurance maladie et l’accès inadéquat aux soins pour les nouveaux arrivants au Canada pourraient également nuire à la santé.

Les causes des troubles du développement

Les troubles du développement peuvent prendre la forme de problèmes cognitifs ou sensoriels, de problèmes sociaux ou de difficultés de la communication ou du langage, d’une atteinte motrice, d’un retard adaptatif ou d’un mélange de ces divers problèmes. Selon le Global Disease Control Priorities Project, de 10 % à 20 % de la population mondiale présenterait un trouble du développement1. Aux États-Unis seulement, on estime que 9 % des enfants de moins de 36 mois ont un trouble du développement2, tandis que 13,87 % de ceux de trois à 17 ans en ont un3.

Les dispensateurs de soins qui voient des familles de nouveaux arrivants jouent un rôle central dans le dépistage et le traitement rapide des troubles du développement. En qualité de défenseurs des intérêts des enfants ou des familles, ils communiquent non seulement avec les membres de la famille, mais également avec les services de santé connexes, y compris les programmes et les services de soutien communautaire. Consultez les modules intitulés Le développement de l’enfant : enjeux et évaluation et Ressources communautaires à l’intention des familles immigrantes et réfugiées pour obtenir des liens vers des agences et services provinciaux et territoriaux de soutien en première ligne.

Les troubles du développement peuvent durer toute la vie, mais leur dépistage précoce, un diagnostic rapide et un plan de traitement adapté peuvent faire toute la différence pour les enfants et les familles touchés. Les médecins qui examinent une famille de nouveaux arrivants doivent se rappeler que les facteurs de risque sont cumulatifs. Dans bien des parties du monde, des conditions d’hygiène et des soins sous-optimaux pendant la grossesse et l’accouchement peuvent avoir toute une série de répercussions sur la santé développementale.

  • Envisagez tout le spectre possible : les risques courants dans les pays en développement, propres au pays d’origine de la famille et propres à l’ethnie ou à la famille même.
  • Soyez prêt à faire face à diverses attitudes vis-à-vis des troubles du développement. Un module du présent site traite des perspectives culturelles vis-à-vis des troubles du développement.
  • Une réponse rapide et sensible aux premiers signes de troubles du développement et une intervention opportune amélioreront le développement clinique de l’enfant et l’adaptation de la famille à la situation.

On ne peut pas toujours déterminer la cause des troubles du développement chez les enfants immigrants et réfugiés. Les facteurs de risque prénatals et périnatals courants à envisager lors de l’évaluation des antécédents du patient et de sa famille sont exposés dans le présent module. Un autre module du présent site traite de l’information et des approches à privilégier pour obtenir des antécédents adaptés à la culture du patient.

Les facteurs de risque prénatals s’établissent comme suit :

  • Les facteurs préconceptionnels
  • Les infections
  • L’exposition aux toxines
  • Les maladies chroniques de la mère
  • Les carences nutritionnelles de la mère

Les causes périnatales peuvent inclure les éléments suivants :

  • Les complications liées à la grossesse
  • Les infections
  • L’allo-immunisation fœtomaternelle
  • La prématurité et le petit poids à la naissance

Les facteurs de risque prénatals

Les causes préconceptionnelles de trouble du développement sont principalement liées à des troubles génétiques ou à des syndromes malformatifs. La plupart du temps, les troubles génétiques sont responsables d’un handicap intellectuel ou d’autres troubles et incluent les troubles monogéniques, les troubles multifactoriels et polygéniques ainsi que les anomalies chromosomiques. Les troubles génétiques associés à un retard du développement comprennent les aneuploïdies et les erreurs innées du métabolisme. La consanguinité accroît la prévalence de troubles génétiques rares et augmente de manière significative le handicap intellectuel et les graves anomalies congénitales, notamment chez les enfants de cousins du premier degré. Certaines communautés ethniques (p. ex., Juifs ashkénazes) ont une prévalence plus élevée de mutations génétiques rares et d’anomalies congénitales qui ont une incidence sur le développement4.

Les causes de retard intellectuel sont réparties dans les catégories suivantes, suivies de leur prévalence1 :

  • Anomalies chromosomiques (30 %)
  • Malformations du système nerveux central (10 % à 15 %)
  • Syndromes d’anomalies congénitales multiples (4 % à 5 %)
  • Problème métabolique (3 % à 5 %)
  • Problème acquis (15 % à 20 %)
  • Cause inconnue (25 % à 38 %)

Les infections prénatales

Lorsqu’ils prennent les antécédents médicaux d’un enfant récemment arrivé au Canada qui manifeste des signes de trouble du développement, les dispensateurs de soins doivent envisager les infections présentées dans les prochains paragraphes et procéder aux tests de dépistage nécessaires. Les femmes enceintes qui viennent d’arriver au Canada doivent subir des tests de dépistage du VIH, de la syphilis et de la rubéole. Les résultats des tests doivent être transmis au dispensateur de soins du nourrisson.

Le VIH

Les enfants de moins de 14 ans subissent rarement le test de dépistage du VIH avant leur arrivée au Canada. Ils n’ont peut-être pas subi de test, même si leur mère était atteinte d’une infection diagnostiquée. L’infection par le VIH de la mère accroît le risque de prématurité et de petite taille par rapport à l’âge gestationnel. Ces deux effets s’associent à une augmentation du risque de mortalité et de retard du développement. Le VIH pénètre dans le système nerveux central de quelques jours à quelques semaines après l’exposition primaire. Le virus provoque des lésions neuronales et la mort des cellules, qui sont responsables d’une encéphalopathie progressive accompagnée d’un handicap moteur, d’une microcéphalie et d’une atrophie cérébrale ainsi que de troubles cognitifs et du langage. Un module du présent site porte sur le VIH-sida chez les enfants nouveaux arrivants.

On ne connaît pas tout à fait les effets de l’exposition au VIH in utero qui ne provoque pas d’infection ni de l’exposition à un traitement antirétroviral périnatal. Des études préliminaires menées aux États-Unis et en Europe sont encourageantes, mais d’après d’autres études menées en Afrique subsaharienne et en Asie, une forte proportion des enfants exposés présente des indices de développement global inférieurs à ceux de la moyenne de la population en matière de langage et de comportement. Cependant, la santé sous-optimale de la mère, la malnutrition, une maladie concomitante et des charges virales élevées peuvent également nuire au potentiel développemental de l’enfant5.

Le cytomégalovirus

Dans les pays industrialisés, le cytomégalovirus (CMV) est la principale infection virale congénitale, sa prévalence mondiale s’élevant à 0,6 % de toutes les naissances vivantes6. Ainsi, 10 % des nourrissons atteints présentent des signes d’infection dès la naissance et courent un risque important de séquelles neurologiques, telles qu’une surdité neurosensorielle (SNS), un handicap intellectuel, une microcéphalie, des troubles convulsifs et une paralysie cérébrale. Le CMV est la principale cause non héréditaire de SNS, qui peut être évolutive, absente à la naissance, unilatérale ou bilatérale. Un autre module du présent site est consacré au dépistage de la surdité chez les enfants nouvellement arrivés au Canada. La perte d’audition et les troubles visuels peuvent s’observer chez un nourrisson qui n’a pas d’autres symptômes.

Le CMV est un herpèsvirus transmis par des contacts interpersonnels étroits avec la salive, le sang, les sécrétions génitales, l’urine ou le lait maternel. Une nouvelle infection ou une infection réactivée chez la mère peut entraîner une transmission maternofœtale en tout temps pendant la grossesse, mais le taux est plus élevé après une infection primaire.

Les souches du virus varient selon l’emplacement géographique. Ainsi, les taux de prévalence de l’infection sont plus élevés dans les populations d’Amérique du Sud, d’Afrique et d’Asie, et plus faibles dans celles d’Europe occidentale et des États-Unis. Le CMV est plus courant chez les personnes qui ne sont pas de race blanche et chez celles qui vivent dans la pauvreté.6

La toxoplasmose

La toxoplasmose congénitale, présente à un taux de 1,5 cas sur 1 000 naissances vivantes, est responsable de déficits neurocognitifs comme le handicap intellectuel, les convulsions et l’atteinte visuelle causée par la choriorétinite. Le Toxoplasma gondii est un parasite et un agent pathogène d’origine alimentaire. L’infection humaine découle de l’ingestion ou de la manipulation de viande crue ou mal cuite qui renferme des kystes, du contact direct avec des chats infectés ou de la consommation d’aliments ou d’eau contaminés par des ovocytes (gamètes) provenant des excréments de chats infectés. Les taux d’infection sont plus élevés en Amérique du Sud, en Méditerranée orientale et dans certaines parties de l’Afrique7.

La rubéole

On estime que 110 000 cas de rubéole congénitale se déclarent chaque année dans le monde. La mère infectée pendant la grossesse transmet le virus de la rubéole au fœtus, ce qui peut entraîner la surdité, des cataractes congénitales, une microcéphalie, des convulsions, un handicap intellectuel, l’autisme, le diabète et la dysfonction thyroïdienne4.

À la fin de 2017, le vaccin contre la rubéole avait été introduit dans 162 pays, mais on estime la couverture mondiale à 52 %8. La rubéole congénitale est plus élevée dans les régions d’Afrique et d’Asie du Sud-Est de l’Organisation mondiale de la Santé, où la couverture vaccinale est la plus basse.

La syphilis

En 2012, on estimait que plus de 900 000  femmes enceintes étaient infectées par la syphilis, ce qui avait donné lieu à environ 350 000 issues indésirables de l’accouchement, 143 000 décès du fœtus ou mortinalités, 62 000 décès néonatals, 44 000 naissances prématurées ou nourrissons de petit poids à la naissance et 102 000 nourrissons infectés9,10. La plupart des pays disposent de tests de dépistage anténatals de la syphilis, mais les taux d’utilisation sont extrêmement variables. En effet, on estime que 30 % des femmes enceintes d’Afrique subsaharienne subissent le test et sont traitées, par rapport à 70 % des femmes d’Europe9. Non traitée, la syphilis a une issue indésirable dans plus de 50 % des cas11. À l’instar de toutes les infections transmises sexuellement (ITS) qui sont évitables, la syphilis est liée au travail prématuré, à un petit poids à la naissance et au décès. La syphilis congénitale peut provoquer la surdité, la microcéphalie, un handicap intellectuel et une atteinte visuelle attribuable à une kératite interstitielle10.

Le virus Zika

Le virus Zika, qui est surtout causé par la piqûre du moustique Aedes, a un effet tératogène confirmé. À part une éruption, les patients eux-mêmes sont souvent asymptomatiques, et les produits sanguins, le sperme et les sécrétions vaginales sont responsables de la transmission12. En 2015, une éclosion au Brésil a permis de découvrir le virus Zika et son association avec la microcéphalie. Depuis 2013, des éclosions ont été signalées dans la plupart des pays d’Amérique du Sud, les Antilles, le Mexique, le Pacifique Sud et les États-Unis. Le virus Zika est également endémique en Afrique, en Asie du Sud et en Asie du Sud-Est13.

Le syndrome associé à l’infection congénitale à virus Zika (SCZ) est relié à une microcéphalie, une atrophie cérébrale, un développement anormal du cortex, une hypoplasie du corps calleux, des calcifications sous-corticales diffuses, une microphtalmie, des cataractes, des anomalies rétiniennes et des contractures congénitales12,14. De 5 % à 15 % des nourrissons nés d’une mère infectée par le virus Zika pendant la grossesse présentent des complications liées au virus14. Un accouchement prématuré et un avortement spontané font partie des autres complications de la grossesse. Il faut envisager un SCZ chez un enfant né en 2016 ou par la suite qui présente une microcéphalie inexpliquée, des calcifications intracrâniennes, une ventriculomégalie ou une grave anomalie du liquide céphalorachidien et des antécédents de voyage de la mère dans un pays où le virus Zika est endémique ou des antécédents de contacts sexuels de la mère pendant la grossesse avec un homme qui s’est rendu dans un pays où le virus Zika est endémique au cours des six mois précédents12.

Les toxines prénatales

Le cerveau du fœtus en développement est particulièrement vulnérable aux toxines de l’environnement. La barrière hémato-encéphalique est plus immature et plus perméable aux toxines. La croissance rapide du cerveau pendant le deuxième trimestre est suivie d’une migration neuronale, d’une différenciation, d’une prolifération et d’un élagage tout au long de la petite enfance. Les cellules en croissance sont plus vulnérables aux toxines, car le cerveau est en formation pendant une plus longue période que les autres organes15.

Le tabagisme

Le tabagisme de la mère pendant la grossesse accroît le risque de placenta praevia, de décollement placentaire et d’accouchement prématuré. Il est également néfaste pour la croissance du fœtus.

La consommation d’alcool

L’exposition à l’alcool in utero est la principale cause tératogène de troubles du développement, y compris la microcéphalie, les troubles cognitifs, les troubles d’apprentissage, le trouble de déficit de l’attention avec hyperactivité et les problèmes de comportement. Dans le monde entier, le syndrome d’alcoolisation fœtale touche environ 1,9 nourrisson sur 1 000 naissances vivantes11. L’alcool est responsable de l’interruption de la production neuronale et d’une destruction secondaire, la migration défaillante des neurones entraînant une microcéphalie.

La consommation d’autres drogues ou de médicaments

L’exposition de la mère à d’autres toxines, y compris les drogues récréatives et certains médicaments (p. ex., acide valproïque, phénytoïne sodique, isotrétinoïne [AccutaneMC]), peut également être responsable de troubles du développement.

La phénylcétonurie

La phénylalanine, un acide aminé, est une neurotoxine pour le cerveau du fœtus en développement. Non traitée, la phénylcétonurie provoque un handicap intellectuel, qu’elle se déclare chez la femme enceinte ou chez le nourrisson.

Les toxines dans l’environnement

L’exposition au plomb, au mercure et à des produits chimiques comme les biphényles polychlorés (BPC) et l’alcool sont responsables de 4 % à 5 % des handicaps intellectuels12. La dose et le moment de l’exposition sont des variables qui contribuent à en prédire les résultats neurotoxiques.

Le plomb peut traverser le placenta dès 12 semaines de grossesse et s’accumuler dans les tissus du fœtus. Les femmes enceintes et les enfants absorbent jusqu’à 70 % du plomb qu’ils ingèrent, comparativement à 20 % dans la population générale. Une fois dans l’organisme, le plomb se répand dans le cerveau, les reins, le foie et les os. Il s’accumule dans les dents et les os au fil du temps et peut être mobilisé pendant la grossesse18. Les enfants malnutris sont plus susceptibles au plomb parce que leur organisme en absorbe davantage s’ils présentent une carence d’autres éléments nutritifs comme le calcium.

Un taux d’exposition suffisant au plomb peut être responsable d’un quotient intellectuel plus faible, de changements comportementaux comme une diminution de la capacité d’attention, un comportement antisocial accru et un niveau d’instruction limité18. L’exposition naturelle provient du sol, mais la pollution, l’essence avec plomb, les produits pour la peinture, les pesticides et l’activité industrielle peuvent accroître les taux de plomb dans l’air, le sol et l’eau12. Dans les pays en développement, les mesures de contrôle contre la pollution sont moins rigoureuses, et l’utilisation de vieille porcelaine et de certains médicaments traditionnels accroît également l’exposition à des toxines comme le plomb. Un module du présent site porte sur l’exposition au plomb des enfants néo-canadiens.

Toutes les formes de mercure peuvent traverser le placenta et être transmises dans le sang du fœtus. Pendant la grossesse, la consommation d’espèces de poissons et de fruits de mer qui contiennent des quantités élevées de mercure est la principale cause d’empoisonnement par le mercure17. D’autres expositions sont possibles dans les pays en développement (et les pays industrialisés) : l’exploitation des mines (particulièrement l’or), certains processus industriels, les usines de charbon et l’utilisation de produits qui contiennent du mercure. L’OMS fournit de l’information sur les effets du mercure sur la santé.

De grandes quantités d’arsenic sont présentes naturellement dans les eaux souterraines, qui peuvent contaminer l’eau utilisée pour la consommation, la préparation des aliments et l’irrigation des cultures. L’arsenic est également présent dans le sol. L’exposition prénatale s’associe à ces deux sources et peut provoquer un retard intellectuel et un retard du développement17. L’OMS fournit de l’information détaillée sur les effets précoces et à long terme de l’arsenic sur la santé.

L’économie des pays en développement est lourdement tributaire de l’agriculture. L’utilisation et l’élimination de fertilisants et de pesticides sont de graves problèmes environnementaux. L’exposition chronique aux pesticides en milieu de travail, notamment dans les populations rurales pauvres, pose problème chez tous les travailleurs, mais est particulièrement dangereuse pour les femmes enceintes et les enfants qui travaillent et vivent près des régions où ces produits chimiques sont utilisés13.

L’exposition prénatale au pesticide connu sous le nom de DDT s’associe à des retards du neurodéveloppement pendant la petite enfance. Le DDT reste dans l’environnement pendant des années et s’accumule dans la chaîne alimentaire et les tissus adipeux des humains14. En Afrique subsaharienne, où le contrôle du paludisme constitue un grave problème, le DDT est toujours utilisé. L’OMS fournit plus d’information sur le DDT, en anglais.

Scénario : déceler un trouble du développement

Un garçon de dix ans apparemment hyperactif arrive à votre bureau pour être évalué. La famille est arrivée d’Europe de l’Est à titre de réfugiée, et même si elle est installée au Canada depuis plus de six mois, ses membres parlent peu le français ou l’anglais. Il a été établi que le garçon dérange en classe, et on pense qu’il aurait un trouble de déficit de l’attention avec hyperactivité.

L’examen habituel révèle une acuité visuelle réduite de l’œil gauche et des troubles de la vision de l’œil droit. Cette constatation suscite un examen du fond de l’œil qui permet de diagnostiquer une grave choriorétinite. Après avoir questionné les parents, le médecin découvre qu’à l’âge de deux ans, l’enfant a été traité pour une toxoplasmose pendant un mois.

Les examens de suivi confirment le diagnostic de toxoplasmose congénitale et un grave retard de développement de l’enfant, même dans sa langue maternelle.

Points d’apprentissage

  • Il faudrait évaluer l’acuité visuelle des immigrants et des réfugiés peu après leur arrivée.
  • De nombreux nouveaux arrivants au Canada ne maîtrisent pas assez le français ou l’anglais pour comprendre les questions d’ordre médical qui leur sont posées ou pour fournir une histoire médicale complète. Les interprètes jouent un rôle crucial pour contribuer à la communication.
  • Les déficiences visuelles et auditives peuvent masquer un trouble du développement, être confondues avec un tel trouble ou s’y ajouter. Plus d’information sur le dépistage de la surdité et le dépistage des troubles de la vue figure dans le présent site Web.

Les maladies chroniques de la mère

Des maladies comme le diabète, l’hypertension, les maladies rénales et les troubles auto-immuns s’associent à des complications de la grossesse qui peuvent avoir des effets indésirables sur le fœtus ou le nouveau-né.

Le diabète de la mère accroît le risque d’anomalies fœtales, de macrosomie (poids de naissance de plus de 4 000 grammes), de traumatismes obstétricaux et d’hypoglycémie à la naissance, qui peuvent tous nuire au développement clinique du nourrisson. L’hypertension, seule ou en association avec un trouble rénal ou auto-immun, peut provoquer une insuffisance placentaire et une insuffisance de la croissance fœtale.

Les carences nutritionnelles de la mère

Figure 1. Plus de la moitié des bébés de petit poids à la naissance habitent dans dix pays.

Nombre de nourrissons de moins de 2 500 grammes à la naissance (en milliers), 2008─2012

Source : Bases de données mondiales de l’UNICEF, 2014, d’après le MICS, le DHS et d’autres sondages représentatifs sur la scène nationale, 2008─2012, à l’exception de l’Inde. http://data.unicef.org/index.php?section=topics&suptopicid=59

Les anomalies congénitales du système nerveux central associées à la malnutrition sont plus fréquentes dans les populations et les pays pauvres en ressources. On estime que 94 % des graves anomalies congénitales se manifestent dans les pays à revenu moyen ou faible, où les mères sont plus vulnérables à la malnutrition de macronutriments et de micronutriments. Ce facteur de risque de trouble du développement peut également s’associer à une exposition accrue aux toxines prénatales, aux infections, à l’alcool et à moins bon accès aux soins de santé et aux tests de dépistage.4,20

La carence en acide folique s’associe à des anomalies du tube neural. Un autre module du présent site porte sur la carence en acide folique. La carence en iode est considérée par l’OMS comme la cause principale, et la plus facile à éviter, de lésions cérébrales dans le monde21. L’iode, qui est associé aux hormones thyroïdiennes, est essentiel pour le développement du cerveau, particulièrement entre le deuxième trimestre de la grossesse et la troisième année de vie. Une grave carence s’associe à un handicap intellectuel, à un retard de croissance et au crétinisme. Une étude britannique a déterminé que les enfants de huit ans étaient plus susceptibles d’obtenir des résultats plus faibles en matière de QI verbal, de niveau de lecture et de compréhension de la lecture que leurs camarades lorsque leur mère avait présenté une carence en iode légère à modérée pendant le premier trimestre de leur grossesse22. La carence en iode est un phénomène écologique dans certaines parties des pays en développement où l’érosion du sol, la perte de végétation causée par la production agricole, le surpâturage du bétail et la surcoupe d’arbres ont épuisé les sources naturelles22. Cependant, on peut observer la carence en iode partout dans le monde. Un autre module du présent site porte sur la carence en iode.

La malnutrition de la mère, avant et pendant la grossesse, peut nuire au poids du nourrisson à la naissance et à son développement. Quelque 20 millions de nourrissons de petit poids à la naissance (moins de 2 500 grammes) naissent chaque année, ce qui représente environ 23,8 % de toutes les naissances et qui peut atteindre 30 % dans bien des pays en développement23. Un poids inférieur à 1 500 grammes à la naissance triple le risque de trouble du développement1. Un module du présent site porte sur la malnutrition des populations d’immigrants et de réfugiés.

Les facteurs de risque périnatals

Les dispensateurs de soins doivent explorer l’histoire de grossesse et d’accouchement des mères qui viennent d’arriver au pays, en s’attardant sur les expériences qui peuvent nuire au développement de l’enfant. Assurez-vous d’explorer ces questions d’une manière ouverte et dénuée de jugement.

Selon la définition de l’OMS et de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada, la période périnatale commence à 22 semaines de grossesse et se termine sept jours après la naissance. Dans une grande partie des pays en développement, les soins inadéquats aux femmes immigrantes et réfugiées pendant cette période critique les rendent plus vulnérables, ainsi que leur enfant, à plusieurs complications liées à la grossesse, telles que les traumatismes à l’accouchement, l’hypoxie et l’ischémie, l’hypoglycémie, l’hyperbilirubinémie et diverses infections graves.

Les complications liées à la grossesse

Dans les pays où il est difficile d’avoir accès à des soins prénatals et obstétricaux, les maladies chroniques de la mère et les complications liées à la grossesse passent souvent inaperçues. Si elles ne sont pas traitées, les affections quipeuvent contribuer à la prématurité ou à un retard du développement s’établissent comme suit :

Le diabète gestationnel s’associe à une macrosomie et à un risque de traumatisme à l’accouchement, à une hypoglycémie du nourrisson et à une mortinaissance.

  • Les troubles hypertensifs (p. ex., prééclampsie et éclampsie), qui peuvent être responsables de graves incapacités à long terme, ont une incidence plus élevée dans les pays en développement. La prééclampsie et l’éclampsie s’associent à une insuffisance placentaire et à une prématurité.
  • Les grossesses multiples entraînent plus de complications obstétricales pendant la grossesse et au moment de l’accouchement.
  • Les traumatismes à l’accouchement s’associent à une macrosomie, à l’obésité de la mère, à une présentation par le siège, à un accouchement vaginal avec intervention, à une petite taille de la mère et à des anomalies du bassin de la mère. Les graves traumatismes à l’accouchement (p. ex., hémorragie intracrânienne) sont peu courants, mais peuvent causer des troubles du développement. La plupart des lésions neurologiques aux nerfs périphériques (p. ex., lésions du plexus brachial), mais pas toutes, se résorbent au fil du temps.

Les infections périnatales

  • Les ITS : La transmission congénitale des herpèsvirus 1 et 2 s’associe à un risque important de troubles neurologiques à long terme. De 30 % à 50 % des nourrissons nés d’une mère infectée par une gonorrhée non traitée et jusqu’à 30 % de ceux nés d’une mère infectée par une chlamydia non traité acquerront une ophtalmie néonatale qui risque de les rendre aveugles si elle n’est pas traitée rapidement. Dans le monde, on estime que de 1000 à 4000 nouveau-nés deviennent aveugles chaque année à cause d’une ophtalmie néonatale.10 Un autre module du présent site porte sur le dépistage des troubles de la vue chez les enfants nouvellement arrivés au pays.
  • Les infections bactériennes peuvent être transmises de la mère à l’enfant par voie transplacentaire, soit pendant la grossesse, soit par la filière pelvigénitale au moment de l’accouchement. Les infections bactériennes congénitales entraînant un sepsis et une méningite néonatals sont d’importantes causes de morbidité néonatale dans les pays en développement. Dans ces pays, on estime que de 0 à 3,06 nouveau-nés sur 1000 naissances vivantes sont infectés par le streptocoque du groupe B (SGB),24 comparativement à 0,24 nouveau-né sur 1000 naissances vivantes dans les pays industrialisés.25 Le SGB invasif s’associe à une invalidité à long terme, y compris les convulsions, les troubles du développement et les troubles de la vision et de l’audition.
  • Les principaux facteurs de risque de SGB à vérifier sont les antécédents de fièvre pendant le travail, un accouchement prématuré à moins de 35 semaines de grossesse, une rupture prolongéedes membranes de plus de 18 heures et une chorioamnionite de la mère.1
  • L’infection à Listeria peut être attribuable à l’ingestion, par la mère, de viande non cuite, de charcuteries et de légumes, de lait non pasteurisé ou d’aliments fabriqués à partir de lait non pasteurisé. La mère enceinte peut avoir des symptômes pseudogrippaux comme de la fièvre, des douleurs musculaires, des nausées et de la diarrhée. La transmission au fœtus provoque un sepsis et une méningite qui s’accompagnent souvent de séquelles. L’incidence d’infections à Listeria est plus élevée chez les personnes d’origine latino-américaine, à cause de la grande consommation de fromage frais.26

L’allo-immunisation fœtomaternelle

L’allo-immunisation fœtomaternelle non diagnostiquée ou non traitée s’associe à de l’anémie et à une grave hyperbilirubinémie. Elle peut entraîner des convulsions, la surdité, des retards cognitifs et une paralysie cérébrale chez les nourrissons qui survivent.

La prématurité

Tableau 1. Les dix pays qui possèdent les taux les plus élevés de naissances prématurées, 2010

Inde 3 519 100
Chine 1 172 300
Nigeria 773 600
Pakistan 748 100
Indonésie 675 700
États-Unis d’Amérique 517 400
Bangladesh 424 100
Philippines 348 900
République démocratique du Congo 341 400
Brésil 279 300

Sources : OMS. 19 février 2018. Naissances prématurées. www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/preterm-birth ; Blencowe H, Cousens S, Oestergaard MZ et coll. National, regional and worldwide estimates of preterm birth. The Lancet; 379(9832): 2162-72.

La prématurité (moins de 37 semaines de grossesse) est un problème mondial. Les facteurs de risque de prématurité sont les grossesses multiples, les anomalies utérines, les saignements placentaires, l’exposition aux drogues pendant la période prénatale, une maladie chronique de la mère, les troubles hypertensifs, la chorioamnionite, une rupture prolongée des membranes et une vaginose bactérienne.

L’absence de soins prénatals, la sous-vaccination et le traitement inadéquat des infections ou d’autres problèmes médicaux de la mère, y compris les infections transmises sexuellement (ITS), sont tous des facteurs qui peuvent contribuer aux troubles du développement d’un nourrisson prématuré.

On estime que 15 millions de nourrissons naissent prématurément chaque année, soit environ une naissance sur dix. Plus de 60 % de ces naissances prématurées ont lieu en Afrique et en Asie du Sud (tableau 1). Au sein même des pays, les familles les plus pauvres sont les plus vulnérables.27, 28

Le dépistage des infections pendant la grossesse

Envisagez les facteurs suivants chez la mère lorsque vous procédez au dépistage d’infections pendant la grossesse :

  • La fièvre
  • Les éruptions
  • Les douleurs abdominales
  • Les malaises généralisés
  • Les nausées accompagnées de diarrhée
  • Les sécrétions vaginales anormales
  • La dysurie
  • L’arthrite

Conclusions

Les troubles du développement peuvent être le reflet d’une constellation complexe de problèmes chez un enfant, mais particulièrement chez les nouveaux arrivants, dont l’étiologie est souvent incertaine. Il arrive que plusieurs facteurs de risque prénatals et périnatals soient en cause, coexistent et aient des effets multiples et cumulatifs sur le développement moteur et cognitif de l’enfant. Certains signes d’incapacité sont évidents dès la naissance, mais d’autres se manifestent aussi tard qu’à l’âge scolaire.

On observe des troubles du développement partout dans le monde. Cependant, le peu d’accès des femmes enceintes à une quantité suffisante d’aliments nutritifs et à des soins prénatals, obstétricaux et postnatals de qualité entraîne une morbidité importante dans les régions en développement. Les immigrants et les réfugiés sont plus vulnérables aux troubles du développement, et certains facteurs de risque sont liés à leur pays d’origine. Les dispensateurs de soins doivent être conscients des risques généraux que courent tous les nouveaux arrivants, mais également des risques propres aux patients, en raison des antécédents liés à l’histoire de leur famille et de leur immigration et à leur groupe ethnique.

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Éditeurs scientifiques

Cecilia Baxter, MD

Mise à jour : mars, 2023